jeudi 30 juin 2011

Et si vous quittiez Facebook ?

Inutile et vide de sens pour les uns, indispensable et vital pour les autres, Facebook a fait couler beaucoup d'encre depuis sa démocratisation entre 2006 et 2008. Acclamé de temps à autres mais souvent décrié, ce réseau social numérique d'un nouveau genre (sans en être le pionnier) est continuellement au centre de nombreuses controverses – et ce malgré son indéniable succès. Pendant un peu plus de deux ans, j'ai été un utilisateur régulier de ce réseau social mondialement connu et utilisé par plus de sept cent millions d'utilisateurs. Il y a quelques mois, pourtant, j'ai décidé de mettre un terme à cette aventure, au grand regret de certaines personnes... et à l'indifférence de tant d'autres. Dans cet article, je souhaiterais partager mon expérience personnelle sur l'utilisation quotidienne de Facebook ainsi qu'exposer les raisons qui m'ont poussé à m'en détacher – à mon plus grand soulagement.


Après plus de deux ans d'utilisation, Facebook était devenu pour moi (comme pour beaucoup d'autres personnes) une véritable habitude, voire un rituel, un peu comme prendre son petit-déjeuner, se brosser les dents ou aller aux toilettes. En se connectant sur Facebook, l'on ressent instantanément le sentiment de connaître tous les derniers faits et les dernières informations, comme si l'on regardait le journal ou que l'on allait au café du village. Une mine d'information complète et très rapide, permettant d'emmagasiner un maximum de données sur une pléthore de personnes en un temps relativement réduit. Sans s'en rendre compte, cependant, cette mine d'information peut petit à petit devenir une drogue – ce qui fut mon cas. Utiliser Facebook, c'est en quelque sorte connaître la (presque) totalité de la vie de vos « amis » sans avoir à prendre directement de leurs nouvelles. Un flux d'information souvent unidirectionnel, parfois bidirectionnel. Cet approvisionnement en renseignements personnels délasse, amuse, interpelle. On ne demande rien à personne et les informations arrivent en quelques clics. Bientôt, l'on sait qu'une personne a mis un terme à sa relation de couple, qu'une autre attend un heureux évènement, qu'une troisième a acheté une très belle voiture et qu'une dernière revient de ses vacances au Mexique. Expression de bonheur, de malheur, de colère ou d'incompréhension, tous les sujets de la vie quotidienne sont abordés. Mais prendre connaissance des moindres faits et gestes des personnes qui nous entourent, de près ou de loin, est-il vraiment un acte dénué de tout danger ?


Tout d'abord, il y a le temps : consulter Facebook prend du temps. Bien sûr, comme je l'ai souligné précédemment, il est possible d'obtenir rapidement un tas d'informations sur une personne grâce à ce site. Mais de combien d'amis disposez-vous ? Rien qu'en faisant défiler la page des actualités, vous pourrez y passer des heures. À de nombreuses reprises, nous sommes amenés à visiter le profil d'une personne pour y chercher davantage de renseignements, tels que des statuts ou des commentaires, ou des médias tels que des photos ou des vidéos. Ensuite, retour à la page des actualités – qui entre-temps s'est fournies de nouvelles entrées – pour continuer la longue et interminable visite. En ce qui me concerne, et sans vouloir être trop curieux, il m'arrivait de perdre plusieurs heures par jour sur Facebook. Au bout d'un moment, on finit par se demander si cela en vaut la peine, le temps étant (à mes yeux) une ressource tellement précieuse. Étant quelqu'un d'ambitieux, qui aime créer, progresser, avancer et surtout apprendre, il m'arrivait bien régulièrement de me dire « Mais pourquoi ai-je passé tout ce temps sur Facebook ? Je n'ai pas su faire ce que j'avais prévu de faire ». Le loisir prend alors le goût de la culpabilité : captivant et distrayant dans un premier temps, pour devenir frustrant lorsque l'on constate le temps que l'on a perdu. Mais pour cela, encore faut-il être conscient du temps que l'on gaspille, et conscient de tout ce que l'on pourrait faire d'autre pendant que l'on surfe sur Facebook. Ce manque de lucidité peut être un danger, par exemple pour toutes les personnes qui utilisent ce site au travail. Noyées par leur dépendance au réseau social et incapables de s'en détacher, certaines personnes peuvent ainsi perdre leurs performances, leur efficacité et leur motivation au boulot. J'en ai été en proie, mais j'ai surtout constaté que d'autres personnes en étaient carrément victimes, mettant en danger leur place auprès de leur employeur. Ceci fut déjà une très bonne raison de quitter le site numéro un sur le web, mais il y en avait bien d'autres.


De par son intime conception, Facebook éveille la curiosité des gens. N'étant pas quelqu'un de curieux par nature (sauf bien sûr dans les domaines de la connaissance générale), j'ai bien fini par accepter l'évidence : je devenais de plus en plus indiscret, fouineur, voyeur. Le site web numéro un sur Internet est aussi la plus belle porte ouverte aux données personnelles de tout un chacun. Bien sûr, il existe de nombreuses fonctionnalités de confidentialité, mais qui en est réellement conscient et qui peut vraiment en tirer le meilleur parti ? Peut-être pas vos parents, votre sœur ou votre meilleur ami restaurateur – qui sont bien entendu présents sur Facebook. Ainsi, vous apprendrez facilement de nombreux détails de la vie de vos « amis » : où ils habitent, avec qui ils vivent, ce qu'ils possèdent, ce qu'ils aiment dans la vie, ce qu'ils détestent, mais aussi et surtout ce qu'ils vont faire ce soir, demain, le week-end prochain ou même l'été prochain. Tout ceci sans avoir à les contacter. Finalement, vous recevez énormément d'informations sur vos amis, sans les demander, un peu comme si ces dernières tombaient du ciel. Pour vous comme pour eux, est-ce vraiment une bonne chose ? Pour ma part, il m'arrivait – comme bon nombre d'utilisateurs de Facebook – de publier certaines informations qui me semblaient anodines, pour me rendre compte quelques temps plus tard que leur propagation était totalement incontrôlée. À de nombreuses reprises, j'ai croisé des connaissances que je n'avais pas vues depuis des mois, voire des années, et à qui je n'avais pourtant rien à apprendre : « Tu as acheté un chouette appartement, j'ai vu, sur Facebook » ou bien « Elle va bien ta nouvelle voiture ? » et même « Ça ne va pas avec ta copine ? J'ai vu sur Facebook... ». Ce que vous tentez de cacher à certaines personnes, via la « confidentialité », d'autres personnes l'apprendront et finiront par répandre l'information à votre place. Restreindre certains commentaires ou certains médias à une poignée de personnes n'indiquera pas à ces dernières de ne pas divulguer l'information. Se retrouver devant une personne et constater qu'elle connait beaucoup de choses intimes sur vous à votre insu est, de mon point de vue, un sentiment assez désagréable – surtout quand vous ne souhaitiez pas qu'elle les sache. Avec des centaines d' « amis » virtuels, difficile de contrôler une information et de spécifier à qui elle peut être adressée, et à qui elle doit être cachée. Si un jour vous ressentez ce sentiment, quand de simples connaissances de votre lointain entourage en savent un peu trop sur votre vie intime, dites-vous qu'en consultant régulièrement Facebook, vous ferez peut être vous-même ressentir ce sentiment à quelqu'un d'autre dans un avenir proche. Dès lors, via ce réseau social, l'on risque de développer une certaine curiosité malsaine... et d'alimenter celle des autres. M'étant rendu compte de la difficulté de contrôler la propagation de certaines informations à mon sujet, j'ai été davantage convaincu que la meilleure chose à faire avec Facebook, c'était de le quitter.


En ces temps difficiles, Dieu merci, vous n'êtes pas seul(e)s : vous avez des centaines d'ami(e)s. Un terme qui rend bien peu hommage à sa définition, lorsqu'il est employé sur Facebook. En effet, un(e) ami(e) est une personne envers qui vous portez une grande affection, laquelle est réciproque, et sur qui vous pouvez compter en toute circonstance. Un(e) ami(e) sera présent(e) lorsque vous serez au plus mal, tout comme quand vous serez au meilleur de votre forme. Vous pouvez lui confier tous vos problèmes, vos malheurs, vos envies, votre ami(e) restera toujours à votre écoute. Un(e) ami(e) sait rendre service sans rien attendre en retour. Évidemment, parmi vos contacts sur Facebook, bien peu de personnes peuvent ainsi prétendre au titre d'ami(e). Vous pouvez vous estimer chanceux(se) si vous dénombrez dix véritables amis dans votre entourage. Parmi vos amis virtuels, vous ne sortirez probablement jamais avec les 80% d'entre eux, ni prendrez de leur nouvelles, vous ne leur téléphonerez jamais. Vous leur souhaiterez un joyeux anniversaire car, dans sa toute grandeur, Facebook vous l'aura rappelé. Vous participerez à des discussions à coups de commentaires et de mentions « J'aime » sur les statuts de certaines personnes, mais si vous les rencontriez dans la réalité, peut-être n'en feriez-vous pas autant – ce qui est mon cas car je suis timide, mais point de timidité sur Internet. Finalement, si vous n'étiez pas sur Facebook, cela ne les ébranlerait même pas d'un poil. Mais soit votre bonté vous a empêché de refuser la demande d'amitié de ces 80% d'amis, soit vous avez désespérément voulu avoir plus d'ami(e)s que dans la (triste) réalité. Pour ma part, il y eu honnêtement des deux. Tout bien considéré, à quoi sert encore Facebook quand notre proche entourage ne se compose que de quelques dizaines de personnes tout au plus ? C'est un peu la réflexion que je me suis faite. Vous ferez davantage plaisir à vos proches si vous leur téléphonez. Si vous prenez de leurs nouvelles sur leur « mur » Facebook, ils ne pourront pas vraiment le savoir à moins que vous ne leur mettiez un petit commentaire. Hélas, nombreux sont ceux qui utilisent ce réseau social passivement : prendre beaucoup d'information mais en donner très peu. Une personne qui paraît inactive (aucun statut sur son « mur », pas de nouvelles photos depuis des mois) lit peut être votre profil chaque jour. Lorsque vous constaterez qu'elle connaît beaucoup plus sur vous que vous ne le pensiez, n'aurez vous pas préféré qu'elle vous téléphone (ou qu'elle vienne vous voir) pour prendre connaissance de ces nouvelles à votre sujet ? Les vrais ami(e)s et les vrais proches restent en contact sans Facebook, par téléphone, par e-mail, ou même par une simple petite visite. Là encore, petit à petit, j'ai reconsidéré la véritable nature des ami(e)s et des proches, ainsi que la façon de les contacter et de leur donner de mes nouvelles.


Facebook, c'est un peu « la place » comme on dit, « the place to be ». Bien qu'il soit virtuel, c'est purement et simplement l'endroit où l'on trouve la plus grande foule hétéroclite au monde. Ce petit détail n'est pas sans risque. Sans que vous le sachiez, un petit défaut de confidentialité pourrait bien vous attirer beaucoup d'ennuis. Depuis quelques temps, Facebook est devenu la nouvelle mecque des pirates informatiques. L'accès aux données est très facile, notamment à partir d'applications tierces. Si vous avez déjà installé quelques applications Facebook comme des jeux, quiz et autres plugins, vous avez dû remarquer que ces dernières vous demandent généralement un accès à vos données. Derrière une simple application peut se cacher un virus, un pirate, ou tout autre acte de malveillance. Par défaut de prévoyance, vous risqueriez de vous retrouver dans une situation difficile et incontrôlée. Ne sous-estimez pas l'importance de vos données personnelles : elles sont une denrée chère et très recherchée par les pirates informatiques, en témoigne la récente attaque du réseau en ligne de la Playstation de Sony, le Playstation Network. Les « hackers » ne constituent pas les seuls dangers. Quid des prédateurs sexuels dans un environnement aussi vaste ? Si vous êtes une jolie femme, vous avez probablement déjà reçu des dizaines de « demandes d'amitié » de la part de parfaits inconnus : le danger est bien réel, des prédateurs sexuels ont déjà été identifiés sur Facebook et arrêtés par le passé. Pour les adolescentes, bien sûr, le risque est encore pire. Par ailleurs, exposer ses données personnelles constitue également un risque pour l'emploi. Aujourd'hui, nombreux sont les employeurs qui n'hésitent pas à épier leurs employés sur le réseau social. Un commentaire déplacé sur votre chef bien aimé, et ce sont les problèmes qui commencent. Le linge sale ne se lave pas en public, mais pourtant trop souvent sur Facebook. Et je parle en connaissance de cause.


Les accrocs de Facebook se demandent souvent comment est-il possible de ne pas y être inscrit, de ne pas vouloir faire partie de cette formidable aventure communautaire. Des personnes qui, comme moi, utilisent un ordinateur connecté à Internet chaque jour et refusent pourtant délibérément de se connecter au premier réseau social au monde. Ces personnes sont-elles asociales ? Ne souhaitent-elles pas renouer le dialogue avec de vieilles connaissances, des amis de longues dates perdus dans les méandres de notre société, ou même de simples membres de leur famille ? J'ai pris le temps d'y réfléchir, et en fin de compte, il m'est apparu que le sentiment de devenir sociable grâce à Facebook était complètement erroné. Car comme je l'ai expliqué plus haut, lorsque l'on reçoit une avalanche d'informations sur ses proches (et moins proches), on ne comprend pas toujours l'intérêt de les contacter par d'autres moyens plus « humains ». Et pourtant, il existe une énorme différence, un gouffre, entre les relations virtuelles (faciles, pré-fabriquées et dépourvues de vrais contacts) et les contacts réels, humains, dans la véritable société. C'est du moins ce que j'ai ressenti, et contacter mes véritables amis dans le « monde réel » pour les revoir, leur parler et passer du temps avec eux m'a apporté plus de bonheur que toutes les fonctionnalités que Facebook peut offrir à ses internautes. Utiliser Facebook m'a petit à petit déconnecté de la réalité (ou tout du moins, d'une partie de celle-ci) : les contacts se prenaient sur Internet, les bons moments se partageaient devant un écran et tout ce que l'on pouvait y lire ou y ressentir constituait le réel, la véritable pensée des personnes, leur véritable opinion de vous, leur véritable relation avec vous. Bien sûr, tout ceci était faux, tant certaines personnes ne prennent pas Facebook au sérieux... mais pour d'autres, cependant, c'est totalement l'inverse. Dans une configuration où certaines personnes utilisent Facebook comme une simple distraction, et ou d'autres y voient une véritable seconde vie, de nombreux malentendus peuvent également émerger et causer de nombreux torts. Encore une fois, il m'est apparu plus opportun de passer plus de temps avec peu de personnes, mais des ami(e)s proches, que j'apprécie et qui m'apporte beaucoup, plutôt que de communiquer de façon plus systématique, moins chaleureuse, avec des tonnes de connaissances ancrées dans la même routine que celle qui m'a petit à petit fait dévier de la réalité. Alors, Facebook est-il vraiment un réseau social ?


Bien sûr, cet article est une appréciation tout à fait personnelle de Facebook, et nombreux sont ceux qui, parmi vous, voient probablement ce site web comme un excellent outil de communication, de loisir, et une formidable avancée technologique dans les méandres du Web 2.0. Je dois bien avouer que Facebook comporte à mes yeux quelques avantages. Tout d'abord, ce site est indéniablement un incroyable succès, issu d'un coup de génie de son créateur, Mark Zuckerberg. Quoi qu'on puisse en dire, ce jeune homme a réussi ce que la plupart d'entre nous ne pourrons probablement jamais réaliser, et c'est tout à son honneur. Ensuite, le grand intérêt de Facebook réside selon moi dans le fait qu'il permette de toucher un maximum de gens en un minimum de temps. Via les groupes ou les pages dédiées à une cause, un évènement ou un intérêt, il est très facile de répandre des renseignements et de faire connaître une activité à toute personne intéressée. Les publicitaires peuvent également tirer parti de ce site pour toucher un maximum de clients potentiels. La publicité est d'ailleurs la première source de revenus du réseau social. Et finalement, Facebook amuse et délasse, fait passer le temps... jusqu'à ce que l'on se rende compte qu'il est possible de mieux mettre à profit les quelques heures dont on dispose chaque jour, dans cette vie qui passe de plus en plus vite.


J'espère que cet article vous a permis de passer votre temps autrement, et s'il vous a plu, n'hésitez pas à la diffuser... sur Facebook, naturellement.

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